Le manteau de pluie

 

C'était une journée particulière... hier j'avais sans doute fait un de mes plus mauvais matches de la saison pour battre 6-3 6-1 Guy Le Borgne pour le démarrage du championnat individuel corpo. Au premier set, me déplaçant avec des pas d'une lourdeur apocalyptique et la grâce d'un jeune éléphanteau, je fus mené 3-1 avant de réagir et d'effectuer une fin de match un peu plus propre à défaut d'être transcendente. Heureusement Guy reprenait après deux mois d'interruption et souffrait d'un problème de condensation sur ses lunettes (rédhibitoire au plus haut niveau, sauf quand on s'appelle Martina Navratilova, qui était myope mais pas borgne et jouait chausée de lunettes). Il faudra serrer le jeu pour les deux autres matches de la poule les 23 et30 avril. Deux excuses à mon début de match poussif : je venais de manger (trop) et j'avais surtout entendu le morceau "La cerise" de Matmatah sur le trajet...un morceau qui m'a trotté dans la tête tout le match...

Ce matin je le réentendis en amanant Gaé chez sa nourrice, et je sentis que la journée serait pénible. Un rendez-vous avec un demandeur d'emploi me confirma cette impression. Convoqué avec moi en premier entretien de suivi mensuel, Mikaël B. me fit passer un sale quart d'heure (ou plutôt 3 sales quarts d'heure); ce psychopate, dont l'assistante sociale nous avait signalé la dangerosité (je savais donc à quoi m'en tenir) relève plus d'un hôpital de jour que de la recherche d'emploi. Il atttaqua dans tous les sens : je n'étais pas capable de lui définir un projet professionnel (il a bossé 6 mois en 10 ans), j'étais de meche avec l'éducation nationale qui l'avait viré de son lycée en 1996 alors qu'il était en pleine ascension (il effectuait une deuxieme année de BEP maintenance agricole) pour cantine impayée (!), j'avais chiffoné son CV (en réalité à peine effleuré) et surtout j'avais eu l'outrecuidance de rechercher des offres d'emploi alors qu'il souhaitait que je lui définisse son projet. Comment un tel dégénéré a t-il atteri à Douarnenez? Mystère... la meilleure c'est lorsqu'il justifia son refus de s'inscrire chez Vediorbis par la présence de cables électriques sur le sol qui ne l'inspiraient pas... Ya des fois où je suis content d'avoir suivi la formation "Gérer l'agressivité des demandeurs d'emploi" et je me souviens , au moment où j'écris ces lignes des conseils d'Alain Parcellier, notre formateur : s'il y a un problème, laissez les portes ouvertes, pensez à sauver votre peau. C'est ce que je fis : prétextant que j'allais photocopier son CV, je ne me rassis pas en rentrant dans le bureau...le tour était joué, l'entretien terminé. C'est avec plaisir que je donnai suite à la proposition de mon responsable fonctionnel : transférer ce demandeur de mon portefeuille (réel) au sien (virtuel) pour le plus grand bonheur de chacun.

La suite de la journée s'écoula comme dans un songe; toujours sous le choc, j'assistai aux 574 km/h du TGV puis à la réunion de service du mardi, avant d'aller sous le soleil chercher Lison à l'école puis gaé chez la nourrice. Il faisait beau, c'était bien. Sur le chemin pour aller chez Jocelyne, Matmatah passait toujours sur Europe 2, c'est sans regret que j'enfonçai un cassette dans l'autoradio. "Sentiment nouveau" de Jean-Louis Murat produisit immédiatement son effet apaisant.